Prométhée et Psyché

Prométhée est ce mi-dieu de la mythologie grecque qui vole aux dieux le feu et les techniques pour réparer l’étourderie de son demi-frère Epiméthée : lors du partage primordial des qualités nécessaires à la vie de chaque espèce d’animaux, les hommes se retrouvent « nus et sans défense ». Alors Prométhée, leur fait cadeau du feu et des techniques après les avoir volés à Héphaïstos, dieu des forges (Vulcain). Prométhée est ainsi le symbole de l’aventure humaine du travail et des techniques. Dans l’œuvre de Michel Clouscard, Prométhée porte la valeur humaine du travail et la promesse de donner toute sa place à la praxis, œuvre humaine par excellence, ouvrant la voie de la construction du politique et de la subjectivité.

Psyché, autre grande figure mythologique désigne ainsi « l’âme », l’amour d’âme, qui est aussi l’âme-sœur de Prométhée : l’élaboration de la subjectivité, dont le mythe de Tristan et Yseult témoigne - Cf. Michel Clouscard : Traité de l’Amour fou, Scandéditions, Paris, 1993.

 
 

Praxis

Ensemble des œuvres des hommes : du travail, de l’art, des créations et institutions de la vie sociale. Ce concept recouvre en partie le concept de « culture » quand celui-ci est différencié de « nature ». Le concept de praxis permet de comprendre toute œuvre humaine comme synthèse ou engendrement réciproque entre théorie et pratique, concept et réalisation, idée et activité. L’activité de travail est la praxis fondamentale de toute vie sociale puisqu’elle permet aux hommes de produire leurs moyens de subsistance et d’existence et de développer les autres formes de la vie sociale.

Michel Clouscard propose de « substituer la praxis au Sphinx », c’est-à-dire de comprendre les problèmes qui se posent aux hommes à partir de leur activité réelle de production de leurs moyens d’existence.

 
  

Œdipe de la praxis

L’Œdipe de la praxis est le symétrique de l’Œdipe freudien, qui est un principe structurant l’Inconscient et générant la construction de la personnalité. L’Œdipe de la praxis est fondateur de l’existence humaine : la praxis articule le développement de l’individu (ontogenèse) sur le développement du genre humain (phylogenèse). Le bébé consomme sans produire et entre ainsi dans une économie politique du genre humain : l’accumulation sociale de biens, produits antérieurement par d’autres.

L’Œdipe freudien est ainsi surdéterminé par les rapports de production et de consommation : la famille nucléaire se « structure » comme élémentaire économie politique. C’est la famille qui, par son dispositif dual de combinaison du système de la parenté et du système des métiers résout la dualité fondamentale de l’économie politique entre consommation et production. Dans la famille féodale, par exemple, le père et le fils aîné sont les propriétaires de l’exploitation. Le cadet et la femme ne disposent que de l’usufruit. L’amour courtois sera l’alliance des subalternes de la famille et des subalternes de la praxis, ceux qui assurent le service féodal (le chevalier)

Comme l’Œdipe freudien structure l’Inconscient et la construction de la personnalité, l’Œdipe de la praxis structure le champ social en générant un Inconscient dynamique de la praxis et de la dialectique de la production et de la consommation.

 
  

Inconscient

Dans l’approche freudienne de la personnalité humaine, l’Inconscient est un concept dynamique de construction de la personnalité à partir du refoulement et de sa structuration sur l’interdit de l’inceste. C’est donc un principe de base de la « psychologie des profondeurs » que Freud établit. Mais cet Inconscient psychologique masque un autre Inconscient : la praxis, la nécessité de produire pour consommer. L’inconscient de la praxis surdétermine toute l’approche contemporaine de la vie sociale et individuelle du libéralisme libertaire. Un projet de refondation sociale doit mettre en évidence cet Inconscient de l’Inconscient pour établir une nouvelle synergie de la production et de la consommation et donner leur juste place aux membres du Travailleur Collectif.

 
 

Antéprédicatif

Mot à mot, c’est ce qui vient avant tout prédicat ou détermination concrète. L’antéprédicatif se donne, selon les philosophies, comme « structure » de la réalité – chez Levi-Strauss par exemple -, ou comme structure transcendantale de l’esprit humain organisant tout donné d’expérience dans des cadres a priori. La prétention à poser un antéprédicatif occulte la dimension fondamentale de la praxis humaine qui est nécessairement œuvre pour produire les moyens d’existence et intervention dans les chaînes causales naturelles.

 
 

Péché originel

Le péché originel est la notion religieuse fondatrice de la chrétienté que Michel Clouscard conceptualise comme consommation sans production propre correspond à une étape où le bébé ne peut encore produire les moyens de sa subsistance, mais doit consommer ce que d’autres ont produit. Cette situation, symbolisée dans la religion par le péché originel, chute du paradis terrestre où l’on consomme sans produire aux dépens de l’Autre homme, constitue la structure de l’Œdipe et de l’Inconscient de la praxis productrice, dans la société de consommation transgressive, de la névrose objective.

 
 

Narcisse et Vulcain

Les deux grandes figures mythologiques que sont Narcisse et Vulcain permettent de figurer la dualité constitutive de l’humain et les fondamentaux de l’économie : Narcisse, figure de l’amour de la beauté de son image et de son plaisir, figure de la consommation. Vulcain, dieu de la forge et du travail, figure de la production. La consommation et la production sont les deux pôles de l’économie politique du libéralisme : le frivole et le sérieux.

Narcisse et Vulcain figurent le partage originel de l’homme. A moi le plaire, à toi le faire. C’est le cogito de l’être social : je suis mon image et/ou je suis ce que je fais. Contradiction originelle qui sera le fondement de la lutte des classes : d’un côté le pouvoir narcissique, de l’autre l’éthique de la praxis.

Une refondation progressiste doit établir le droit au bonheur sur la relation dialectique de Narcisse et de Vulcain qui sont les créateurs du corps, de sa dualité constitutive, deux démarches conquérantes. Vulcain fait du corps un outil, Narcisse en fait une image. Pour Narcisse, le corps est le moyen de séduire, pour Vulcain, le moyen du travail. La constitution d’une éthique de la praxis nécessite de mettre à jour les causes et les raisons anthropologiques et économiques de cette dualité. Le sport est le lieu de synthèse de ces deux principes anthropologiques.

 
 

Frivole et sérieux

Le frivole et le sérieux sont les déclinaisons de la consommation et de la production dans l’économie politique du libéralisme libertaire. La mise en relation du frivole et du sérieux dans le libéralisme libertaire correspond à un nouvel espace social – le mondain – et à une combinatoire des nouvelles couches moyennes.

 
 

Marché du désir

C’est l’engendrement réciproque de l’économie de marché – orientée vers la satisfaction des besoins - et du désir, une création du libéralisme libertaire qui redynamise l’économie du profit :
- le fantasme devient marchandise licite ;
- le « produit » est élaboré par de nouveaux métiers ;
- un apprentissage quotidien de masse « forme » la clientèle potentielle, en particulier avec le nouveau marché des jeunes et des femmes.

 
 

Mondain

Le mondain est l’espace social de mise en relation du marché et du désir, espace où s’accomplit la synthèse des produits-marchandises et de la subjectivité. D’un point de vue de la dynamique libérale-libertaire, le mondain est une éducation, voire même un dressage à la consommation du marché du désir : tout désir peut trouver à s’objectiver dans une marchandise. Le mondain traditionnel - « petit monde de ceux qui comptent » - se constitue en sphère sociale élargie de métiers des nouvelles couches moyennes.

 
 

Potlatch, clientélisme, marché

Le potlatch est un principe archaïque des formes sociales dites primitives, la grande fête où les produits doivent être consommés. Le libéralisme libertaire opère la synthèse du potlatch et des deux autres principes issus d’époques différentes que sont le clientélisme et marché. Le clientélisme est une pratique des sociétés traditionnelles où certaines couches sociales se placent sous le patronage de patriciens ou parrains appartenant à des fractions de classe plus hautes dans la hiérarchie, comme cela était le cas à Rome et l’est encore dans les formes sociales maffieuses. Le marché est cette forme sociale dans laquelle les produits sont librement offerts à l’achat sans autre condition que de payer.

 
 

Permissif et répressif

Ce sont les deux pôles symétriques de l’économie politique du libéralisme libertaire, qui constituent une double dynamique : essor de la permissivité pour créer le marché du désir et répression sur le travail et la production. L’engendrement réciproque du permissif et du répressif est la condition même de développement du populo-fascisme. Une morale et une éthique citoyenne doivent promouvoir l’unité du « fais ce que voudras » et de la règle et valoriser l’interdit comme lieu de construction de la personne.

 
 

Économie politique

Le concept d’économie politique a été élaboré par Aristote, repris par les économistes dits classiques, Smith et Ricardo, et retravaillé par Marx – « Critique de l’économie politique » . Ce concept fondait l’analyse conjointe de la production et des échanges et des formes sociales et politiques. L’économisme moderne – voire l’économétrisme – occultent les dimensions sociales et politiques engagées dans l’analyse des phénomènes économiques ; il justifie par là l’idéologie du libéralisme libertaire qui conçoit le politique comme une instance posée au-dessus de l’économie, tout au plus régulatrice. L’objectif d’une refondation sociale progressiste rompt avec cette séparation libérale et nécessite de revenir aux fondamentaux de l’économie politique.

 
 

Chrématistique

La chrématistique est l’art de s’enrichir, littéralement définie par Aristote comme échange d’une marchandise (M) destinée à en accroître la valeur marchande: (A’>A) :
A -> M -> A’
L’échange chrématistique se distingue de l’échange économique dans lequel la valeur marchande ou l’argent n’est qu’un intermédiaire permettant d’échanger des marchandises :
M -> A -> M’

 
 

Libéralisme libertaire

Le concept de libéralisme libertaire synthétise les caractéristiques actuelles du capitalisme libéral, ultra-libéral des sociétés de type occidental : une forme politique s’inscrivant dans la tradition libérale classique de la démocratie, une puissante répression qui sévit sur le travail en même temps que le libéralisme économique crée un marché mondial hyper-concurrentiel. Enfin une consommation puissamment orchestrée comme « marché du désir » rendant licite toute marchandise y compris fantasmatique.

Le libéralisme libertaire peut ainsi jouer l’exploitation sur les deux tableaux et créer un double profit : au niveau du travail et de la production, mais aussi au niveau de la consommation et de la subjectivité soumise à une auto-exploitation paradoxale.

 
 

Nouvelles couches moyennes

Les nouvelles couches moyennes constituent le point d’appui du libéralisme libertaire : par l’animation et le management, elles sont les agents de la mise en œuvre du libéralisme, par leur situation de couches moyennes qui consomment sans produire, elles sont à distance des couches populaires qui produisent sans consommer.

Les nouvelles couches moyennes sont à la fois l’instrument de la « gouvernance » libérale et les victimes du libéralisme libertaire. Couches intermédiaires, elles évitent le face à face classe-contre-classe du capitalisme concurrentiel classique, mais font aussi le lit du populo-fascisme caractéristique du libéralisme libertaire.

 
 

Travailleur Collectif

A l’étape du salariat généralisé, le Travailleur Collectif est la classe ouvrière élargie, unité d’action dans le procès de production, construite réellement dans le milieu de travail entre ouvriers, employés, ingénieurs-techniciens-cadres. On doit y adjoindre ceux qui participent à la production de la vie sociale, les routiers par exemple, mais aussi le PDG, ceux qui ont produit - les retraités – et les « salariés » qui n’entrent pas dans la classification proposée, comme les intermittents du spectacle. La réalité fonctionnelle du Travailleur Collectif dans la production doit devenir acte politique de gestion de la relation entre production et consommation dans le Parlement du Travailleur Collectif.

 
 

Surplus

Surplus de l’exogamie monogamique, du système de la parenté, de la noblesse et de la bourgeoisie (le cadet) et surplus du mode de production féodal (le chevalier) et du capitalisme concurrentiel libéral. La mise en relation des deux origines du surplus est le fondement de l’Inconscient de classe ; celui-ci se développera selon l’amour courtois et la sentimentalité romanesque.

 
 

Animation et management

Les deux systèmes hiérarchiques du loisir et du travail. Ce sont des a priori organisationnels qui impliquent la participation et l’investissement. L’animation est machinale, et le management est convivial. Deux dressages.

 
 

Colonialisme, mondialisation

Le colonialisme est une pré-mondialisation comme celle-ci est un post-colonialisme. Ce qui les distingue et les sépare, c’est que la mondialisation est la solution du problème que le national-socialisme ne pouvait résoudre, empêtré dans le nationalisme. Alors la défaite de la nation a comme conséquence la perte de l’empire. avec la mondialisation, le fascisme n’est plus la solution finale et désespérée de la crise. Cette mondialisation peut faire « l’économie » du fascisme. L’expression nationale de la relation entre consommation et production, réduite aux biens d’équipement peut être conditionnée par le géopolitique et sa double relation Nord-Sud et Est-Ouest. Alors que le désir submerge l’Occident, la paupérisation absolue écrase le tiers et le quart mondes. Comme s’il y avait une relation directe entre le consumérisme des uns et la misère des autres.

 
 

Fascisme, national-socialisme, populisme

« Le fascisme traditionnel est le national-socialisme », dit Michel Clouscard, « il est spécifique d’un mode de production, le capitalisme concurrentiel libéral. Il témoigne de la crise », parce qu’il porte en lui une contradiction décisive entre nation et capitalisme. La période classique du développement du fascisme est l’accession à un capitalisme d’Etat, période de complémentarité entre nationalisme et répression sur le travail pour constituer la grande industrie. « La xénophobie et le racisme sont le moyen d’homogénéiser la nation », faite de l’émanation régionaliste des classes traditionnelles et des castes au service de l’Etat.

Le développement du marché du désir induit une nouvelle détermination politique : le marché du désir doit pouvoir s’accomplir comme moteur du libéralisme libertaire : le fascisme national-socialiste serait un frein à ce développement. Mais deux déterminations nouvelles apparaissent :

- tout un « pré-fascisme comportemental » se met en place autorisant dans le fantasmatique les pires exactions et valorisant le négatif et le nihilisme, en particulier dans le champ culturel-mondain et artistique ;

- une nouvelle figure politique apparaît, le populisme, combinant les attentes des libertaires et des répressifs de l’ancien nationaliste pour à la fois réprimer le travail et libérer les pulsions.

La dimension mondialiste du libéralisme lui permet de « faire l’économie » du fascisme classique, qui n’appartient d’ailleurs pas à sa tradition. Michel Clouscard souligne que « le fascisme ne doit pas être une référence automatique et machinale », dans la mesure où la stratégie libérale se dédouble selon les pays « en voie de développement » et les pays industriels et post-industriels : dans ces derniers le fascisme est un repoussoir qui permet de laisser croire que le libéralisme serait la bonne et, surtout, la seule solution.

 
 

Impératif catégorique

Par opposition à l’impératif hypothétique, qui commande de faire une action en vue d’une fin - par exemple sois gentil si tu veux qu'on t'aime -, l’impératif catégorique est, selon Kant, la forme adaptée à un vrai contenu moral : « Fais ce que dois », non pour en attendre ceci ou cela, mais absolument. Pour Kant, le contenu de la morale se déduit de la forme de l’impératif catégorique. Si je m’interroge pour savoir si je dois mentir dans des cas douloureux, je n’ai qu’à me demander si le précepte de mon action peut devenir une règle universelle : or, si tous les hommes mentaient, alors plus personne ne croirait personne, donc le précepte « je peux mentir » dans cette circonstance, deviendrait contradictoire : le mensonge présuppose d’être cru. Kant élabore « Les fondements de la métaphysique des mœurs » à partir de ce formalisme pour écarter l’ambiguïté qu’induirait la prise en considération des circonstances concrètes : est-ce que je mens à la personne sur sa maladie parce qu’elle n’est pas en situation de supporter la vérité ou bien par confort personnel

A l’opposé de cette fondation morale formelle, Michel Clouscard opère une fondation morale à partir de la praxis de production humaine : tu dois produire pour vivre, c’est une règle universelle. Le procès de production porte déjà en lui-même un devoir-faire face à la nécessité naturelle, ce qui ne peut être autrement. L’éthique humaine oppose à la nécessité naturelle « manger pour vivre », une force au moins égale, « travailler pour vivre ». L’édifice moral est alors à la fois fondé en nature et œuvre humaine de la loi, constructrice de l’humanité. C’est aussi ce fondement qui permet de récuser la permissivité du libéralisme libertaire et de proposer un fondement moral concret : l’équité de la production et de la consommation.

 
 

Morale et éthique de la praxis

Le genre humain, pour devenir autonome dans l’être, se fait d’abord « intentionnalité », projection dans le temps, vers un but, une fin. Cette intentionnalité doit se faire puissance pratique du faire –praxis – au moins égale à celle de l’être – de l’ontique, de l’existant – et non moins égale à son logos, sa logique. L’intentionnalité s’exprime par la position d’un impératif catégorique : « tu dois faire » qui contient à la fois l’acte et l’obligation de faire.

Alors apparaît cette liberté de la praxis qui est la morale : dans l’action de faire, la participation des individus à la réalisation d’un but se transmue en relations entre sujets. En produisant du blé nécessaire à leur survie, les hommes co-construisent leurs propres relations humaines.

La morale citoyenne est l’expression sociale des valeurs d’un groupe réel, alors que l’éthique de la praxis est l’élaboration raisonnée de la loi de la production du genre humain.

 
 

Spiritualité laïque

La spiritualité laïque n’est autre que la ré-élaboration des traditions spiritualistes, religieuses ou morales au moment où les praxis humaines accèdent à une totalité fonctionnelle (travail, institutions sociales, etc.). Mais la spiritualité laïque est aussi apport et création de nouvelles dimensions des valeurs sociales et humaines.

 
 

Évolutionnisme

Dans l’œuvre de Michel Clouscard, la notion classique d’évolutionnisme – théorie de l’évolution des espèces contre les théories de la création des espèces par Dieu ou contre les théories fixistes – prend un sens nouveau. C’est un véritable concept : l’évolutionnisme est l’enchâssement de deux ordres, celui de la nature et celui de la praxis. Par sa capacité à produire socialement son existence, le genre humain introduit un sens, une finalité qui n’existe pas dans la nature, « devenir du devenir » ou devenir aveugle.

L’évolution des espèces, la phylogenèse, devient pour le genre humain création de l’ontogenèse, développement de l’individualité et de la subjectivité. La consommation autorise un espace de jouissance de soi dans la synchronie, temps simultané, alors que la production nécessite de travailler à rebours des chaînes causales naturelles tout en exploitant leurs lois (diachronie, succession des temps).

L’évolutionnisme permet alors de créer cet espace de liberté qui autorise le jeu : « jouez, même s’il y aura un perdant ». Il est aussi la matrice d’une morale citoyenne du bonheur dont le sport est un modèle.

 
 

Anthropologie, Ontologie

L’anthropologie est l’étude ou la science de l’homme qui, par-delà ses différences sociales et ses coutumes, permet de définir les éléments universels communs. Michel Clouscard en énonce les fondements à partir de la dialectique de la production et de la consommation, dont la relation équitable peut générer l’équité universelle dans le rapport entre les hommes et les peuples.

L’ontologie est l’étude de l’être, de tous les êtres qui existent ; elle permet de situer les hommes dans l’ensemble des êtres existants. L’homme est un être social qui produit les conditions de son existence par la praxis.

 
 

Substance

Mot à mot, « Substance » signifie ce qui demeure dessous, ce qui subsiste par-delà les phénomènes visibles, le plein de l’être par opposition aux changements incessants des phénomènes. Selon les philosophies, « Substance » équivaut à Essence des choses, au sens d’être plein, complet de tout ce qui existe, par exemple chez Hegel ; ou comme puissance divine de production de la variété des êtres et des choses, dans l'œuvre de Spinoza par exemple. Michel Clouscard définit le concept de Substance, à la suite de la tradition hégélienne, comme horizon de plénitude d'accès au monde, réconciliation de la nature et de la praxis humaine.

 
 

Homme originel et homme naturel, diachronie et synchronie, phylogenèse et ontogenèse

Ce sont autant d’étapes de l’ontologie temporelle de Michel Clouscard. Elles se constituent comme dualité de complémentarité de l’homme issu du diachronique, de l’évolutionnisme modelé par la praxis et de l’homme du synchronique, homme naturel, formé par le principe de plaisir. L’homme originel se détermine selon les filiations ontologiques (être, genre, individu), l’homme naturel est la création logique et phénoménologique des catégories de l’Œdipe. Ce n’est pas l’Œdipe qui constitue, c’est l’Œdipe qui est constitué par la logique du mode de production et de l’exogamie monogamique.

 
 

Dialectique (engendrement réciproque des contraires)

La dialectique, dit Hegel, est la méthode de la philosophie. Elle met à jour la dynamique des contraires qui travaillent la réalité et que le processus de la connaissance ne fait que formaliser. La méthode dialectique montre l’engendrement réciproque des contraires, par exemple comment le maître devient esclave des savoir-faire de son esclave ou, ici, comment le libéralisme produit un populisme néo-fasciste et porte en lui une répression inouïe sur le travail. Le lecteur attentif observera que la méthode dialectique est celle qui est à l’œuvre dans l’écriture de Michel Clouscard.

 
 

Exogamie monogamique

L’exogamie monogamique est un système de parenté propre au développement des sociétés occidentales. Il impose de choisir son conjoint hors de la famille (exogamie), mais aussi de n’avoir qu’un seul conjoint, que l’on soit homme ou femme. La féodalité a permis le développement de cette organisation de la parenté, mais en a aussi accompli l'élaboration culturelle dans l’amour courtois et le mythe de Tristan et Yseult. Toute la construction occidentale de la subjectivité y trouve ses fondements. Cf. Michel Clouscard, Traité de l’amour fou, Scandéditions, Paris, 1993.

 
 

Sport

La haine et le mépris du sport caractérisent le libéralisme libertaire. C’est que les tenants du sport ne peuvent opposer à la statue de Praxitèle, le plus grand sculpteur de l’Antiquité, que la toile blanche de « Machin ». L’esthétisme mondain est inexistant face au sport qui est l’esthétique de la praxis. Le corps du sportif n’est-il pas aussi le corps du « sujet transcendantal », ou sujet de la connaissance ? Pour apprendre et connaître, ne faut-il pas tenir à distance l’esthétisme de Narcisse – le corps pour séduire – et savoir se distancier du corps-outil ?

 
 

Violence

Ce serait la même chose, une bouffe à la récré et une bombe sur Hiroshima ? La violence se consomme aussi symboliquement dans les banlieues.

 
 

 
  
 
 
 
Rédaction éditoriale Marie-Antoine Rieu | Conception Michel Darras | Photographie Renaud Daridan
© Michel Clouscard| Mise à jour le